Virginie TEYCHENE : La musique des mots

VirginieTeycheneParGerardTissier

Rares sont les chanteuses à l’écart des modes. Peut-être parce que beaucoup succombent, aujourd’hui peut-être plus encore qu’hier, à la tentation de subordonner leur talent (quand elles en ont) à une image bien léchée et à un show bien huilé. Mais Virginie Teychené est de celles pour qui fouler le velours rouge des escaliers de la gloire ne se fait pas à n’importe quel prix. Ce qui ne l’empêche pas de triompher sur les scènes des grands festivals qui osent ne pas se contenter des stars du music business.
Il faut dire que cette jeune femme mène sa carrière de façon atypique, ce qui a contribué à forger sa personnalité musicale. Si bien des chanteuses d’aujourd’hui courent les enseignements tarifés de leurs aînées où les écoles de chant plus ou moins renommées, Virginie est allé chercher sa vérité d’artiste en écoutant ses idoles et en montant très jeune sur les planches, y apprenant combien le bal est une école difficile.
En outre, elle n’a jamais voulu tenter l’aventure parisienne, restant à peaufiner son art dans son Var natal, travaillant et répétant jusqu’à obtenir une maîtrise vocale en tous points remarquable. Mais au-delà d’une grande technique qui sait rester dans l’ombre, c’est le naturel, l’émotion et le swing qui sont les donneurs d’ordres. Pendant des années Virginie Teychené mit ces qualités au service d’un répertoire de grands classiques du jazz, faisant quelques incursions du côté de la bossa nova ou de Joni Mitchell.
Mais aujourd’hui c’est en français qu’est son nouveau challenge, sans avoir peur de brouiller son image de « vraie » chanteuse de jazz. Cette littéraire de formation a réussi à dompter le problème de distanciation qu’elle avait avec sa langue maternelle en oubliant le sens des mots pour se laisser guider par la beauté des textes. Nougaro, bien sûr, mais aussi Baschung ou Ferré viennent stimuler cette amoureuse de la langue qui s’immerge jusqu’à plus soif dans la poésie des mots et leur musique intérieure. Et, avec les musiciens auxquels elle est fidèle depuis des années et auxquels se joint par moment Olivier Ker Ourio, elle réussit à rendre homogène un mélange de français, d’anglais ou de portugais en faisant sienne une esthétique nourrie au jazz depuis longtemps.
Une belle leçon de musique donnée par une jeune femme qui chante avec sa tête.

Philippe VINCENT

Nouveau CD (sortie le 6 octobre) : « Encore » (Jazz Village/Harmonia Mundi)
En concert à Béziers les 13 et 14 novembre (Théâtre Sortie Ouest)

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