« Asymétrie »
Slim Abida
Tunsik Production
Une belle découverte que la sortie d’ « Asymétrie », le nouvel album du bassiste d’origine tunisienne Slim Abida. Un deuxième album pour lui qui, après « Fréquences basses » un premier opus solo plaçant la basse, son instrument fétiche, au cœur de sa musique, nous revient aujourd’hui avec un projet partagé avec le pianiste Edison Knight, le batteur d’origine algérienne Lounis Mahrouche, le trompettiste Roman Didier et le saxophoniste, flutiste Louis Chevé-Melzer.
Un album qui dès les premières plages nous invite, en imposant un rythme ternaire, à sortir de notre train train et se laisser porter par une musique entêtante tantôt latin-jazz, tantôt hip-hop, parfois plus funk mais surtout d’une étonnante modernité.
A travers sept plage parfaitement calibrées, Slim Abida et ses partenaires s’appliquent à nous livrer leur vision d’une vie bien souvent formatée et ne laissant que peu de place à l’authenticité.
Ainsi de « Butterfly » morceau plutôt moderne faisant la part belle aux envolées de saxophone à « In Medias Res » où sont dénoncés sur des rythmes actuels les mirages engendrés par les médias et les réseaux sociaux, en passant par une belle ballade titrée « Father » en hommage à son père où encore « Asymétrie » titre éponyme d’un album qui questionne, Slim Abida nous offre une palette sonore et s’exprime comme à son habitude à travers un jazz voyageur dont la démarche n’est pas sans rappeler celle du multi-intrumentiste Marcus Miller ou encore du bassiste camerounais Richard Bona.
Au-delà de l’aspect purement musical, Slim Abida livre sa conception d’une société dans un contexte particulier où règne l’incertitude.
En revisitant ce rythme dans lequel sont ancré nos vies, il nous fait prendre conscience de l’obligation qu’il peut y avoir de sortir d’une cadence imposée pour aller plus loin et préparer, sans doute un avenir meilleur.
Dans « Confusion », deuxième titre de l’album on alterne entre urgence et résolution, voire optimisme en retrouvant ce rif entêtant qui ne vous lache plus.
« The circle », où les musiciens se régalent, est sensé nous faire sortir du cercle répétitif de nos vies alors que « Digital Dummy Factory », empreint de mélancolie, questionne par exemple sur le rôle du numérique dans l’éducation des enfants…
Autant d’interrogation traduites en musique avec beaucoup d’à propos, une certaine finesse et pas mal d’énergie par Slim Abida et ses acolytes qui, au final, nous livrent un album jazz fusion des plus agréables.
Laurent BONNEFOY – Radio 16