[vc_row][vc_column][vc_column_text]Le début de chaque année est souvent l’occasion de dresser un palmarès de la production discographique des douze mois précédents, quitte à ne pas éviter les redites, les évidences ou les gratifications inutiles pour des enregistrements maintes fois encensés. Les albums de John Scofield, de Joe Lovano & Dave Douglas ou de Charlie Haden & Gonzaloo Rubalcaba en feraient partie tout comme ceux de Géraldine Laurent ou d’Eric Le Lann. Mais, avec Christian Pouget et J.Paul Gambier, il nous a semblé plus judicieux de mettre l’accent sur une dizaine d’enregistrements de musiciens qui ne font pas régulièrement la une de la presse spécialisée et qui n’écument pas les grands festivals de l’hexagone. Dans le désordre, voici donc une liste non exhaustive de belles découvertes à faire pour tous ceux qui ne se contentent pas de ce/ceux (et celles) dont on parle.
Philippe Vincent
YOANN LOUSTALOT / FRANCOIS CHESNEL / ANTOINE PAGANOTTI « Pièces en forme de flocons » (www.bruitchic.com).
Enregistré « live » en club, ce trio trompette/piano/batterie est un exemple superbe de ce que peut donner une conception très libre de l’improvisation. Emouvant et poétique.
PhV
ALESSANDRO LANZONI TRIO feat. RALPH ALESSI « Seldom » (CamJazz/H.Mundi)
Le mariage de l’énergie et de la musicalité pour ce jeune prodige italien du piano (22 ans) qui signe un disque étonnant en compagnie d’un trompettiste que l’on avait oublié à tort depuis son compagnonnage avec Steve Coleman. Du punch !
PhV
BRUNO ANGELINI « Instant Sharing » (La Buissonne/H.Mundi)
Au carrefour de l’improvisation et de l’écriture, le violon rencontre le trio et le jazz prend ici ses plus beaux atours pour nous rappeler l’identité qu’il cultive aujourd’hui de ce côté de l’Atlantique. Beauté de la musique rehaussée par la beauté du son.
PhV
EMIL SPANYI / JEAN BARDY « Very Blue » (Parallel/Absilone)
Dans la tradition des grands duos piano/contrebasse, la science pianistique du musicien hongrois et la sobriété exemplaire de Jean Bardy tissent une dentelle musicale saluée par Alain Jean-Marie comme « une matière très précieuse ». Un délice.
PhV
ALEX TASSEL “Serenity” (Moods/L’Autre Distri)
Voilà un quintet qui sonne comme les meilleures formations de hard-bop, nous rappelant que ce n’est pas pour rien que l’on vénère encore aujourd’hui les productions Blue Note. Une complicité entre les musiciens forgée depuis des années n’y est pas pour rien et le talent de solistes du niveau de Sylvain Beuf ou de Laurent de Wilde est la cerise sur le gâteau.
PhV
AGATHE JAZZ 4TET « Feeling Alive » (Neuklang/H.Mundi)
La jeune franco-brésilienne Agathe Iracema a la musique dans le sang et le talent précoce. Des qualités vocales indiscutables, du goût pour choisir son répertoire et de l’âme pour habiter ce qu’elle chante. Avec en prime sur cet album Nicolas Folmer et Fred Wesley. Ses nombreuses consœurs n’ont qu’à bien se tenir !
PhV
PHILIPPE SOIRAT « You Know I Care » (Paris Jazz Underground/Absilone)
Voilà un musicien qui aura attendu la cinquantaine pour faire un disque comme leader. Mais quand on est l’un des batteurs les plus demandés de la scène parisienne … Pas de chichis mais un bon vieux quartet avec Vincent Bourgeyx, Yoni Zelnik et le ténor David Prez pour un répertoire bien choisi et savamment arrangé. Yeah !
PhV
JONATHAN ORLAND « Small Talk » (Paris Jazz Underground/Absilone)
Deuxième album d’un jeune altiste qui nous offre une musique pleine d’élégance et d’intelligence. A côté d’une paire rythmique de haut vol (Yoni Zelnik et Donald Kontomanou), la guitare cosmique de Nelson Veras s’intègre à merveille dans le projet du leader. Étonnant …
PhV
LAS HERMANAS CARONNI « Navega Mundos » (L’Autre Distribution)
Même si ce n’est pas du jazz, faisons une place ici au violoncelle de Laura et aux clarinettes de Gianna Caronni. Pour leur troisième album, les deux jumelles argentines ont su garder à leur musique toute sa fraîcheur tout en approfondissant leur propos musical. La grâce est au rendez-vous …
PhV
KENNY WHEELER /JOHN TAYLOR “On the way to two” (CAM JAZZ, distribution Harmonia Mundi)
Dernier adieu de ces deux amis, vieux compagnons fidèles depuis plus de quatre décennies, partenaires en musique nous offrant ce duo inédit, avant leur grand départ à quelques mois d’intervalle, conversation intime, frissonnante, entre la trompette ethérée, évanescente, le bugle chargé de brouillards cuivrés, et le piano subtil, écrin rythmique enveloppant les chorus, sculptant des cristaux scintillant, déployant des harmonies évoquant Satie, avec un lyrisme retenu, provoque une nostalgie mélancolique à l’écoute des deux musiciens disparus.
CP
CONCERT CHOC : Collectif Coax “Le Radeau de la Méduse” Villelongue-Dels-Monts 6 août 2015
Noirceur du ciel sur une mer d’encre, vagues monstrueuses aux creux profonds tels des ravins escarpés, vents fouettant les voiles déchirées comme du papier, pont submergé d’incessantes déferlantes, la Méduse craque de toute sa carcasse, de la quille jusqu’aux mats, gouvernail broyé, enfonçant sa coque tel un bélier défonçant un portail de forteresse, avant qu’une voie d’eau ne s’engouffre comme un torrent dans ses cales, déclenchant l’engloutissement du navire dans les flots déchaînés, plongeant ses survivants dans l’enfer, perdus sur ce radeau, devenant des morts vivants affamés, meurtriers sauvages, cannibales, cherchant la rédemption, implorant la mort de les délivrer de ce cauchemar.
Habités au milieu de cette tragédie humaine comme s’ils revivaient ce naufrage épique, transcendés par la transe d’Isabelle Duthoit, brûlant au coeur du texte terrifiant, l’horreur sur ce radeau, du murmure plaintif jusqu’aux hurlements d’effroi, portée par le trio batterie, guitare, saxophone baryton, Di Donato, Henocq, Nageotte, alternant au gré de l’épopée, entre un souffle apaisé et la fureur de rage d’un jazz aussi libre que rock, lacérés par les jets de peinture vivante, les coups de pinceaux poétiques et de hache frénétique de Guibout, distordus par les improvisations vidéo, de Boisseuil triturant l’action en images, le Collectif Coax, livre une interprétation puissante et halluciné de cette terrifiante histoire du ” Radeau de la Méduse “, traversant les siècles, faisant surgir les fantômes du passé, ou ceux contemporains, des réfugiés fuyant la guerre et la misère, traversant la méditerranée, et sombrant avec l’espoir perdu d’une vie nouvelle.
CP
Duo autres voix de piano « Quatre = Onze == [7] » (Neos Music / Socadisc)
C’est un espace hybride entre contemporain / jazz / électroacoustique que le pianiste et compositeur Patrick Defossez nous invite à découvrir avec la captation publique d’une suite pour deux pianos, percussions, laptop, sax et trombone.
Ces « autres voix » se structurent autour d’une proposition mixte, instrumentale et électro, celle du duo Patrick Defossez / Anne-Gabriel Debaecker, et ouvrent une voie inattendue aux cuivres de Daniel Erdmann / Benny Sluchin.
Musique à l’abord exigeant, cet opus se singularise par ses développements sensibles et poétiques.
JP G
HENRY THREADGILL Zooïd “In for a Penny, one for a Pound” (PI Recordings, distribution Orkhestra)
L’athypique formation Zooïd de Henry Threadgill, vétéran de l’AACM, réunit depuis plus d’une décade, saxophone alto, flûte, tuba, guitare acoustique, violoncelle et percussions, délivrant un jazz contemporain intimiste, loin des extravagances du free-jazz, mêlant écriture, ambiences folk, et improvisations d’une rare beauté, où planent toujours des fantômes de la Nouvelle Orléans.
CP
JOELLE LEANDRE / BENOIT DELBECQ / FRANCOIS HOULE “14 rue Paul Fort Paris” (Léo Records, distribution Orkhestra)
Musique née de l’instant de la rencontre, où chacun tente d’oublier, de désapprendre pour renaître, se livrant à l’exploration du son, sans préméditation, mettant sa maîtrise instrumentale au service de l’improvisation pure, pour nous transpercer de leur mystérieuse magie sonore.
CP