Eye of I
James Brandon Lewis : ts / Chris Hoffman : cello / Max Jaffe : dr + friends
Anti
Date de sortie : 03/03/2023
Oublions le soudain vedettariat de James Brandon Lewis (vedettariat bien mérité ceci soit dit) pour nous plonger en plein cœur de Eye of I. Le trio se compose de JBL au saxophone ténor, Chris Hoffman au violoncelle et Max Jaffe à la batterie. Quelques amis (Kirk Knuffke, Shazad Ismaily, Anthony Pirog, Joe Lally, Brendan Canty) viennent prêter main forte au saxophoniste.
L’album aux diversités affichées ne débute véritablement qu’avec The Blues Still Blossoms, faux blues et vrai lamento où la plainte se fait caressante, tournoyante, métaphysique. Cello en distorsion continue, fracas de peaux, s’admire le chaos, et au milieu, le souffle serein de l’ami James Brandon. Lyrique, le saxophoniste l’est. Electrique, cabossé in Middle Ground, ténor au grain sensible in Eye of I, Lewis se pose, diffuse, compose, choisit sans sanctionner. Il est celui qui se défait de ses années d’apprentissage tout en se posant la question du futur comme l’atteste Fear Not (grandiose : le climax du disque !), dernière plage du disque partagée par le groupe post-rock The Messthetics.
MSM live
James Brandon Lewis : ts / Aruan Ortiz : p / Brad Jones : b / Chad Taylor : dr
Intakt / Orkhêstra
Date de sortie : 02/02/2023
Le Molecular Systematic Music de James Brandon Lewis pourrait-il avoir le même effet d’oxygénation qu’en son temps le David S. Ware Quartet ? Si la générosité des quatre musiciens saute aux oreilles dès le premières notes de A Lotus Speaks, le fil qu’ils se tendent est de ceux qui ne peuvent céder tant leur proximité est grande. Helix est l’exemple type de ce free bop à l’intérêt jamais démenti tel que le concevait Trane lors des chaudes soirées du Vanguard de novembre 1961 : jazz éternel qui ne peut exister que dans le présent d’une action bouillonnante (Brad Jones fait, ici, grande impression). Si la sensibilité du ténor apparait principalement dans le cadre des ballades (Of First Importance, Loverly), elle peut aussi se réfugier dans des phrasés faussement cadenassés avant d’être libérée sans préavis (Molecular).
Ailleurs, la mélancolie et le cri coltranien demandent leurs justes places (An Anguish Departed, Césaire) puis se dissipent au son de rythmes complexes venus des Caraïbes (Neosho, morceau de bravoure d’Aruan Ortiz et Chad Taylor). Et s’il est encore trop tôt pour répondre par l’affirmative à notre question inaugurale, reconnaissons à James Brandon Lewis et ses amis une grande bouffée d’air frais.
Luc BOUQUET