Edward Perraud & Das Kapital: Un trio peut en cacher un autre !

Depuis des années on connait le batteur Edward Perraud pour sa participation à plusieurs orchestres mais c’est sa contribution au trio Das Kapital qui le ramène régulièrement sur le devant de la scène. Avec « Vive la France » (Label Bleu / L’Autre Distribution), c’est à un hommage à la musique française que nous convie aujourd’hui ce trio européen spécialiste en reconstruction musicale (l’allemand Daniel Erdmann est aux saxophones et le danois Hasse Poulsen à la guitare). Fidèles à une conception où les frontières entre les genres musicaux se  dissolvent dans la réécriture des morceaux qu’ils choisissent, nos trois larrons s’attaquent aujourd’hui aussi bien à Ravel, Satie et Lully qu’à Barbara, Brel et Brassens et au fameux Born To Be Alive de Patrick Hernandez qui fit fondre la cire des dance-floors des années 70. Dans un langage qui se réduit difficilement à l’étiquette « jazz contemporain », Das Kapital réussit une fois de plus à combler nos oreilles parfois rassasiées de conformisme musical et à apparaître comme l’un des groupes les plus originaux d’aujourd’hui. A ne pas manquer.

Mais Edward Perraud a plus d’une baguette dans sa manche et il faut écouter aussi le trio qu’il a formé avec Bruno Chevillon (contrebasse) et Paul Lay (piano). Avec « Espaces » (également chez Label Bleu), il nous emmène dans le monde de ses compositions où il a voulu célébrer « ce qu’il y a entre les notes ». Autant dire qu’il ne s’agit pas ici d’un « disque de batteur » mais de celui d’un musicien qui est un infatigable chercheur de combinaisons et d’alliages sonores et qui laisse beaucoup de place à ses deux compères au sein d’un trio où le classicisme le dispute à la modernité. Le résultat est à la hauteur de l’ambition du batteur-compositeur et la musique exhale une beauté étrange et saisissante. Enfin, les heureux acquéreurs de l’album pourront aussi admirer dans le livret une quinzaine de photos superbes où l’on voit que les « espaces » ont aussi toute leur place dans l’œil du musicien-photographe. Edward Perraud, un artiste total.

Philippe VINCENT