DISQUE DU MOIS
Proposé par Philippe VINCENT
En 1981, après des années 70 essentiellement passées à surfer sur la vague électrique du jazz-rock, Chick Corea revint à la musique acoustique avec l’album “Three Quartets”. Le niveau de jeu de ses complices (Michael Brecker, Eddie Gomez, Steve Gadd) allié à la forme d’écriture que Corea avait voulu fit de ce disque une sorte de référence pour les générations de musiciens qui suivirent et Christophe Dal Sasso, dont on connait la plume, s’en empara pour une création à la Philharmonie de Paris avant de l’enregistrer. Si on connait depuis longtemps les qualités d’écriture et de direction d’orchestre de Dal Sasso à la tête de son grand orchestre à géométrie variable, on est une nouvelle fois bluffé par le résultat de son travail. S’éloignant du modèle qui l’inspire tout en en respectant les formes d’origine, il ouvre des perspectives nouvelles, tant sur le plan de l’ensemble que sur celui des individualités qui composent sa formation. Ainsi on retrouve toute la richesse sonore qui a fait le succès de ses projets précédents et qui établit une filiation avec les grands noms du genre, Bill Hollman, Marty Paich, Gil Evans ou même Ivan Jullien dont il fut l’élève. Et d’’un autre côté, comme tout bon chef d’orchestre, il sait mettre en valeur les individualités talentueuses qui composent son groupe. Ainsi le “rôle֨” de Michael Brecker est dévolu à trois saxophonistes qui s’en sortent chacun avec un formidable brio : Stéphane Guillaume dans le Quartet N°1, Rick Margitza dans le N°2 et David El-Malek dans le N°3. Quant à Pierre de Bethmann, même pas peur de mettre ses doigts sur les traces de ceux de Corea. Entre élégance et fulgurance ses solos sont pour lui aussi éblouissants. On l’aura compris, voilà un disque qui brille de mille feux et dont la chaleur communicative laisse à distance bien des productions actuelles.
[PhV]