François Corneloup “Seuils”

François Corneloup “Seuils” / l’optique du musicien

Ce 1er avril, François Corneloup visitait en voisin la Librairie du Contretemps1 à Bègles pour présenter son recueil de photos : Seuils. Tout a commencé par un solo de baryton, déambulation rêveuse Entre les Terres, saluant au passage John Coltrane et quelque Sophisticated Lady. On ne vantera jamais assez l’acoustique parfaite des librairies, lieux de rencontre, lieux de vie essentiels. On y reviendra. Puis François Corneloup parla de son livre : 149 photos réalisées entre 2007 et 2021.

Car François est un musicien photographe. Et ce statut change tout. On trouvera bien au fil des images quelques beaux portraits de musiciens saisis en plein jeu : Fawzi Berger, Sylvain Kassap, Claudia Solal, Barre Phillips… Mais le propos de Seuils est ailleurs : dans la proximité complice d’un musicien avec ses compagnons.

Le photographe de concert ne vit pas cette intimité du musicien, coulisses et loges, hôtels et voyages, « seuils » secrets hors représentation. Moments d’attente, moments de repli, moments de repos. La face cachée de la scène. Et c’est ce regard de musicien sur ses pairs que nous offre François Corneloup. Emblématiques de ces moments de pause non posés, les magnifiques portraits de Jacques Mahieux et Claude Tchamitchian plongés dans leurs songes. Ou encore Richard Bohringer et Jacques Di Donato s’accordant un somme réparateur.

Se définissant modestement comme musicien « qui fait des photos », François Corneloup est un photographe passionnant. Maître des clairs-obscurs sculptant la beauté des visages (Rémi Charmasson, Christophe Marguet, Christophe Monniot…), habile à jouer des miroirs, autre façon de réfléchir (David Chiesa avec Julia Robin, Tony Hymas avec Grego Simmons, Sylvain Bardiau, Ada Dyer, Élise Caron…), géomètre tirant au cordeau (Antonin Rayon, Michel Portal, Étienne Bultingaire, Grego Simmons à Treignac, Frédéric Gastard, Jacques Bonnaffé, Monique Retailleau…).

La rencontre avec Guy Le Querrec a été fertile. En témoignent un portrait inaugural et un épilogue, mais avant tout un art de la composition et du rythme qui construit l’image (étonnante perspective alignant Philippe Teissier du Cros, Louis Moutin et Sébastien Texier) et structure le face à face des photos : Raphaël Imbert / Matthias Mahler, Isabelle Duthoit et Franz Hautzinger / Sylvain Giraud, Guillaume Roy / Didier Levallet sous l’apparition bienveillante de Chris McGregor.

Les mots de Jean Rochard, fidèle compagnon de route, viennent miroiter en contrepoint. François Corneloup a diffusé sur les réseaux sociaux quelques portraits estampillés « essentiel! » à une période où les autorités pointaient ce qui le serait, ce qui ne le serait pas. On l’aura compris : Seuils est un livre ESSENTIEL!

Jean-Yves Molinari, texte et photos
Adrien Le Galloc’h, croquis additionnel

Jazzdor Series

Jazzdor Series, qui se consacre aussi à l’édition, publie SEUILS, recueil qui se parcourt comme un album de famille, une galerie de portraits ponctuée par la prose vivace du producteur-artisan Jean Rochard.

  1. Librairie hautement recommandable à l’enseigne de bon augure pour l’amateur de musiques syncopées : 5 cours Victor Hugo 33130 Bègles

Partager

Publications récentes

Catégories

Archives