Les retrouvailles, après la parenthèse de 2020. Saluons la belle énergie de Bruno Tocanne qui se démène pour offrir dans son village de Charente un festival exemplaire – selon la juste formule de Xavier Prévost.
Et c’est un bonheur de revivre ce programme. Vendredi 17 septembre : le trio Robin Fincker Bernard Santacruz Samuel Silvant ouvre le festival en beauté. Musique forte, généreuse, puisant aux racines vives du jazz quelque part du côté d’Ornette et Motian. D’emblée le ton était donné. Magnifique découverte.
Puis ce fut samedi le solo labyrinthe du (trop) rare Denis Badault, jonglerie malicieuse et virtuose de thèmes à deviner.
Etincelant, tout comme le duo Samuel Blaser Marc Ducret, complices depuis une dizaine d’années. Le jazz se nourrit de ces rencontres de musiciens, ni rivalité ni compétition mais le plaisir bluffant de se surprendre en repoussant les limites.
Retour au solo pour deux moments de grâce dans la petite église romane de Trois-Palis. Robin Fincker samedi et Vincent Courtois dimanche ont joué avec l’acoustique exceptionnelle du lieu, explorant les résonances. Du côté du public, la sensation de toucher au plus près le timbre des instruments, toute la finesse du grain et de la vibration. Et nous avions affaire à deux magiciens. Expérience mémorable.
L’occasion aussi de découvrir un autre Vincent Courtois, interprète des classiques du XXe siècle avec la sonate de Ligeti. Les deux accords pizzicato et le glissando du Dialogo écrit en 1948 sonnent étrangement comme du pur Vincent Courtois. Ligeti plagiaire par anticipation, diraient les Oulipiens.
Pour conclure ces trois jours à Trois-Palis, il fallait bien le 4tet de François Corneloup, Jacky Molard, Catherine Delaunay et Vincent Courtois : « Entre les Terres ». Musique d’une beauté évidente, riche de ses racines celtiques mais pas seulement, profonde et furieusement joyeuse jusque dans cette danse bretonne de la mort.
Merci Bruno pour ce festival essentiel ! Nous savons que la belle aventure se poursuivra avec l’édition 2022 de JAZZ(S) A TROIS-PALIS.
Jean-Yves Molinari, texte et photos